La restructuration de la dette en Espagne, une alternative à la procédure collective

Chute de la demande interne, manque de trésorerie, retards de paiements sont autant de facteurs qui placent de plus en plus d’entreprises dans l’impossibilité de faire face à leurs obligations (paiement des salaires, honorer les factures des fournisseurs, remboursement des crédits, paiement des loyers etc). Dans ce contexte de crise, et face au manque de trésorerie à court et moyen terme, il est fréquent que les entreprises en difficulté se trouvent en situation d’insolvabilité.

Dans une telle situation, les entreprises disposent de deux outils pour faire face à leur insolvabilité : l’ouverture d’une procédure collective et la restructuration de la dette. Si ces deux outils visent à assurer la viabilité future de l’entreprise, l’ouverture de la procédure collective implique de confier la gestion de l’entreprise à un administrateur judiciaire désigné par le juge du tribunal de commerce. La nomination d’un administrateur judiciaire pour redresser la situation de l’entreprise a pour but de garantir l’indépendance des créanciers.

Au contraire, la restructuration de la dette se place sur le terrain de la négociation privée entre l’entreprise et ses créanciers. Prenant acte des difficultés de l’entreprise, les créanciers vont proposer au débiteur des conditions plus flexibles pour le paiement de ses dettes, afin de préserver la viabilité de l’entreprise. Les créanciers vont donc offrir une série d’avantages qui méritent d’être pris en considération.

En ce sens, les entreprises en difficulté peuvent essayer de renégocier leurs dettes avant de se retrouver en situation d’insolvabilité, et tenter d’éviter ainsi non seulement l’ouverture d’une procédure collective, mais également l’engagement de la responsabilité du dirigeant de l’entreprise. L’engagement de la responsabilité du dirigeant pourra être évité à condition que ce dernier bénéficie du soutien des créanciers détenant au moins 60% des dettes de l’entreprise, et d’un rapport favorable rendu par un expert indépendant dont la tâche consistera à se prononcer sur:

  1. La suffisance des informations fournies par le débiteur
  2. Le caractère raisonnable et réalisable du plan de viabilité proposé par la société, à court comme à moyen terme.
  3. La proportionnalité des garanties, au regard des conditions normales du commerce, au moment de la signature de l’accord.

Ainsi, la loi sur la faillite vise à offrir des alternatives à la procédure collective grâce a des accords de restructuration de la dette qui permettent à l’entreprise d’obtenir des délais de paiements plus longs, de nouveaux financements ou encore de nouvelles conditions financières dans le but d’offrir une solution plus économique et plus souple à la situation de faillite.

Cependant, en considération des difficultés intrinsèques pour arriver à un accord global, la législation espagnole a tenté de formaliser les accords de restructuration de la dette, par la loi 38/2011, du 10 octobre, portant modification de la loi sur la faillite, et établissant certaines règles de forme permettant de garantir la confiance et la sécurité des créanciers ainsi que des tiers. Cette loi rend également obligatoire l’intervention de professionnels qui aident le débiteur et peuvent même le remplacer pour mener les négociations.

Les étapes à suivre pour rendre l’accord effectif sont les suivantes :

Phase préparatoire

La société devra élaborer un plan de viabilité et due diligences ainsi que des rapports informant sur la situation économique et juridique du débiteur, son activité professionnelle et marchande, et sur la dette à restructurer. Il sera nécessaire de fournir les documents et renseignements nécessaires aux interlocuteurs avec lesquels s’ouvriront les négociations pour restructurer la dette.

Début des négociations

Il sera nécessaire d’identifier le créancier le plus approprié pour représenter les autres et créer le comité avec lequel il faudra négocier.

Le créancier en question devra donc bénéficier d’un mandat pour représenter les autres. Il conviendra donc d’établir ce mandat et d’y inclure les clauses de confidentialité et les questions qui feront l’objet de négociations. Les créanciers représentés s’engageront à ne pas intenter d’actions judiciaires pendant la durée des négociations. Il faudra également définir le contenu du futur accord de restructuration de la dette.

Contrat ou accord de restructuration de la dette

Si les négociations aboutissent à un accord, celui-ci devra contenir les quantités, les paiements, les plans d’amortissement, les intérêts, les frais et les garanties qui auront été décidés. L’accord devra également prévoir des mécanismes de contrôle par lesquels une partie des créanciers veillera à la bonne exécution du contrat.

D’autre part, poursuivant l’objectif de faciliter les moyens extrajudiciaires de restructurer la dette des entreprises en difficultés, la loi sur la faillite prévoit la possibilité pour le débiteur d’informer le juge du tribunal de commerce du début des négociations sur la restructuration de sa dette. Cette information a pour effet de suspendre temporairement l’obligation du débiteur de déclarer sa faillite (le débiteur a normalement l’obligation de déclarer la faillite dans les deux mois à compter de la date à laquelle il a pris connaissance, ou aurait dû prendre connaissance, de son insolvabilité).

La restructuration volontaire de la dette est, en définitive, une alternative à l’ouverture d’une procédure collective qui représente une opportunité intéressante pour les entreprises, et qui leurs offre les garanties nécessaires pour jouir d’une certaine sécurité juridique face à leurs créanciers. Toutefois, l’opération ne peut réussir que si les entreprises sont suffisamment diligentes et prévoyantes et qu’elles effectuent en amont une analyse de viabilité à court et moyen terme, ce qui leur permettra de demander elles-mêmes la restructuration de leur dette avant d’être dans l’obligation d’effectuer une déclaration volontaire de faillite.

Pour plus d’informations concernant la restructuration de dette en Espagne,

Cet article ne relève pas du conseil juridique

Articles complémentaires