La mise en place d’un Accord dans une Procédure Collective en Espagne

Une procédure collective est une procédure judiciaire grâce à laquelle plusieurs créanciers d’un même débiteur en état de cessation des paiements tentent de recouvrir leurs créances. La procédure collective s’ouvre à la demande du débiteur (concurso voluntario) ou de l’un des créanciers (concurso necesario).

Suite à son ouverture, l’administrateur judiciaire (administración concursal) se substitue aux dirigeants dans la gestion financière de l’entreprise et inventorie ses biens et ses créances. Durant cette phase, les créanciers doivent déclarer le montant, l’origine et la qualité de leurs créances à l’administrateur judiciaire, qui détermine leur validité.

L’accord anticipé

Dès la demande d’ouverture de la procédure collective (en cas de concurso voluntario) ou dès le jugement d’ouverture (en cas de concurso necesario), le débiteur peut proposer un accord aux créanciers (Ley Concursal art 104). Cet accord, dit anticipé, consiste en l’octroi de facilités de paiement au débiteur par les créanciers, pour lui permettre de continuer son activité tout en assurant le remboursement d’au moins une partie des créances. Pour être valable, la proposition d’accord anticipé doit :

  • Contenir l’adhésion de créanciers représentants 20% du passif en cas de concurso necesario, 10% en cas de concurso voluntario (Ley Concursal art 106.1)
  • Être validée par le juge, qui vérifie la légalité de son contenu (Ley Concursal art 106.3)
  • Être validée par l’administrateur judiciaire. Si l’avis est défavorable, le juge peut passer outre pour valider la proposition (Ley Concursal art 107)

Une fois validée, la proposition doit être adoptée par les créanciers selon les conditions de majorité suivantes (Ley Concursal art 124) :

  • Être approuvée par des créanciers détenant plus de créances ordinaires (ni privilégiées, ni subordonnées) que ceux qui la rejettent, lorsque le paiement est intégral avec un délai de 3 ans ou moins, ou lorsque le paiement est immédiat avec un rabais inférieur à 20%
  • Être approuvée par des créanciers détenant plus de 50% des créances ordinaires si l’accord comprend un rabais inférieur à 50% et un délai de moins de 5 ans
  • Être approuvée par des créanciers représentant plus de 65% des créances ordinaires si l’accord comprend un rabais supérieur ou égal à 50% des créances ordinaires et un délai de plus de 5 ans en aucun cas supérieur à 10.

Dans cette première phase, l’administrateur judiciaire publie la liste des créanciers et l’inventaire des créances. Il est alors possible de s’y opposer sous un délai de 10 jours pour contester la somme ou la qualité d’une créance, mais aussi l’admission ou la non-admission d’un créancier à la procédure. Une fois ce délai expiré, le juge vérifie si la proposition d’accord a atteint la majorité requise. Dans ce cas, l’accord est entériné par le juge (Ley Concursal art 109). Sinon, la phase d’accord débute (Ley Concursal art 110.1), sauf si le débiteur demande la liquidation de l’entreprise, ce qu’il peut faire à tout moment.

L’accord ordinaire

Durant cette deuxième phase, le débiteur et l’ensemble des créanciers peuvent faire des propositions d’accord, dits ordinaires. Chaque proposition est présentée par un ou plusieurs créanciers représentants au moins 20% du passif. Un accord est ensuite adopté ou non par l’Assemblée des créanciers, selon les conditions de majorité déjà évoquées.

Si la proposition est adoptée par le conseil des créanciers, le juge doit homologuer l’accord pour l’entériner. Il vérifie alors la légalité des conditions de réunion du conseil et du contenu de l’accord, notamment que :

  • L’accord contient une diminution des créances ou un délai de paiement, ou les deux, ainsi qu’un échéancier de paiement (Ley Concursal art 100.1)
  • L’accord n’entraîne pas la liquidation totale du patrimoine du débiteur, ni la remise en cause du classement des créanciers (Ley Concursal art 100.3)

Ainsi, la mise en place d’un accord lors d’une procédure collective peut s’avérer très profitable pour les deux parties. Le débiteur peut perpétuer son activité, et les créanciers obtenir un remboursement de leurs créances souvent meilleur que celui qui aurait été obtenu grâce à la liquidation. Cependant, les objectifs des parties divergent, si bien que le créancier aura souvent intérêt à refuser la proposition anticipée pour proposer ensuite un accord qui lui serait plus favorable. Néanmoins, l’accord anticipé a l’avantage de réduire la durée de la procédure et donc les coûts y afférents, coûts qui viennent grever le patrimoine du débiteur au détriment des créanciers et de la survie de l’entreprise.

En tout cas, le plus important dans une procédure collective reste de connaître la situation du débiteur. En effet, c’est cette dernière qui va déterminer si un accord est possible, et à quelles conditions. Il est donc souhaitable de se faire accompagner de spécialistes afin d’analyser correctement la situation du débiteur.

Paul Pasques et Belén Crego

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Cet article ne relève pas du conseil juridique

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