L’exécution d’un jugement européen en Espagne

Avant la mise en place d’une reforme juridique au niveau de l’Union Européenne, il était quasiment impossible de faire appliquer un jugement d’un État membre à l’autre. Cependant, l’actuel Règlement du Conseil (CE) No. 44/2001 du 22 décembre 2000 portant sur la compétence, la reconnaissance et l’exécution des jugements en matière civile et commerciale contient des règles sur l’exécution du jugement dans un autre État membre. Puis, le Règlement 1215/2012 est venu modifier le CE pour rendre la procédure d’exécution plus simple. Mais finalement, bien que cette procédure d’exécution d’un État à un autre ait été simplifiée, il existe toujours certaines instances devant lesquelles l’exécution d’un jugement peut être rejetée.

En ce qui concerne l’exécution des jugements provenant d’États membres de l’UE, l’Espagne applique le Règlement 44/2001. En revanche, elle suit la Convention de La Haye du 21 octobre 1976 pour ce qui relève des jugements provenant d’État tiers. Les accords bilatéraux régulent les jugements étrangers  rendus entre l’Espagne et de nombreux autres pays. La loi espagnole exige que toutes les parties soient notifiées d’une décision judiciaire avant son exécution. Elle réclame aussi que tous les documents soumis aux cours espagnoles soient traduits dans cette langue. Pour terminer, et conformément à l’article 549 de la loi de procédure civile espagnole, la procédure d’exécution d’un jugement étranger devra commencer par une requête du demandeur et contenir un bref résumé des faits et des fondements juridiques appuyant sa demande.

Le règlement 44/2001 du Conseil établit les règles concernant les jugements rendus dans les États membres de l’Union Européenne. La dernière partie du règlement pose le principe de reconnaissance mutuelle des jugements entre les États membres. Il ajoute aussi la nécessité de recourir à une procédure d’exequatur pour bénéficier de la force exécutoire d’un jugement provenant d’un autre État membre. Cependant, le règlement ne couvre pas les matières fiscales, douanières ou administratives. De même, sont exclues de son champ d’application : l’état et la capacité des personnes physiques, les régimes matrimoniaux, les testaments et successions, les faillites, la sécurité sociale et l’arbitrage. Quelques exceptions supplémentaires s’ajoutent en matière d’action publique, d’incompatibilités avec des jugements précédents et plus particulièrement les jugements rendus par défaut quand le défendeur n’a pas eu la possibilité adéquate d’organiser sa défense.

Le règlement 1215/2012 – aussi appelé Règlement Bruxelles I bis – a modifié les règles vues précédemment en créant un régime simplifié, tout en gardant inchangé le cœur du règlement. La mission de ce nouveau règlement est de rendre plus facile la circulation des jugements au sein de l’Union et de garantir un accès rapide a la justice. Avant la mise en place de ce règlement, un titre exécutoire supplémentaire était exigé afin de faire appliquer un jugement provenant d’un autre État membre. Dorénavant, la procédure d’exequatur n’est plus exigée. L’article 39 du Règlement 1215/2012 dispose qu’un jugement exécutoire dans un État membre le sera également dans tous les autres, sans qu’il soit nécessaire d’obtenir une déclaration justifiant de sa force exécutoire.

Néanmoins, certaines formalités pesant sur le demandeur restent de rigueur envers l’autorité compétente chargée de l’exécution du jugement étranger. L’article 42(1) du règlement Bruxelles I bis prévoit qu’aux fins de l’exécution d’une décision rendue dans un autre état membre, le demandeur devra communiquer à l’autorité en charge de l’exécution les deux documents suivants : Une copie de la décision réunissant les conditions nécessaires pour en établir l’authenticité, ainsi qu’un certificat délivré par l’instance d’origine.

Par ailleurs, le règlement 1215/2012 offre toujours un fondement juridique permettant de refuser l’exécution d’une décision. C’est l’hypothèse dans laquelle l’application d’une décision provenant d’un autre État serait incompatible avec l’ordre public de l’État du résident. Le refus d’application pourra aussi être justifié lorsque le jugement a été rendu par défaut. Enfin, il en sera de même lorsque le jugement est incompatible avec un jugement rendu précédemment dans un autre état et portant sur les mêmes faits. Il existe d’autres exceptions permettant un refus mais celles précédemment évoquées sont les plus courantes.

En conclusion, la procédure garantissant l’exécution d’un jugement dans un autre État membre va dépendre de la façon dont ce dernier a été rendu. Cependant, et comme il a été évoque précédemment, certains formalités restent nécessaires pour solliciter l’exécution d’une décision étrangère au sein d’un État membre.

Justine Matthys et Karl H. Lincke

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